He Qi: Le Ressuscité |
L’homme dans le livre de la Genèse n’avait pas encore de nom. Adam signifie en effet l’homme, le terreux. Mais ici les artistes sont nommés : Bessalel et Oholiab, fils de Ahissamak. Les artistes sont des personnes ; ils apportent une contribution personnelle. L’art suppose un engagement personnel, une relation personnelle entre l’artiste et Dieu, entre l’artiste et la communauté.
L’art ne souffre pas le prêt à porter. De
plus, c’est Dieu qui nomme l’artiste. L’art n’est pas un moyen pour se
« faire un nom ». Ce n’est pas l’art qui donne l’identité à
l’artiste ; celui-ci reçoit son identité profonde de Dieu. Pas d’art pour
l’art.
J’aimerais
donner deux exemples d’artistes chinois que j’ai rencontrés il y a quelques
temps. Deux artistes avec une grande personnalité, que leur art reflète.
D’abord le peintre He Qi qui a dû se battre pour se faire reconnaître.
Un jour, un pasteur chinois
l’a invité à peindre sa nouvelle Eglise. Il lui a montré le tableau du Christ
ressuscité (voir le tableau) en lui demandant s’il pouvait en faire une
fresque. Le pasteur a gardé le silence et lui a répondu : « Non,
cette image est trop chinoise. Nous voudrions que vous fassiez une copie de la
Cène de Léonard de Vinci ». Il a refusé et lui a expliqué que Léonard a
peint les personnes de cette fresque avec des habits de leur époque, qu’il a
inculturé l’Evangile dans son art.
Quand les chinois parlaient
du christianisme, ils le considéraient comme une religion occidentale. Cette
conception doit changer, car le message de l’Evangile est universel. Il
concerne aussi les chinois. L’artiste chinois ne doit pas perdre sa
personnalité chinoise. Au contraire, son art doit l’exprimer.
L'émondage de la personnalité
Comment se forge la personnalité d’un
artiste ? Vous en connaissez les chemins mieux que moi. Ils sont multiples.
Vous savez aussi que la personnalité se construit à travers des épreuves et des
souffrances. Rien de grand ne se fait sans passer par ce creuset. Jésus appelle
cela l’émondage, en utilisant le symbole de la vigne et des sarments :
« Je suis la vraie vigne et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui, en moi, ne porte
pas de fruit, il l’enlève, et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde,
afin qu’il en porte davantage encore ».
Oeuvre de Hung |
A Loppiano, un centre du mouvement des Focolari près
de Florence, j’ai rencontré un autre artiste chinois, Hung, un grand sculpteur
et calligraphe. Il a compris sa vocation artistique dès son jeune âge et était
reconnu comme un prodige tant son habilité était grande. Il s’est consacré avec
ardeur et passion à son art. Puis il a rencontré le Christ et lui a consacré
son art en faisant partie d’une communauté, le Focolare. Un jour, il a reçu un
appel à aller aux Philippines pour se mettre au service de la communauté
là-bas. Mais les exigences de ce nouvel engagement étaient si grands qu’il
n’avait plus le temps de travailler son art. Pendant dix ans il n’a pas pu le
pratiquer.
Cette expérience douloureuse a été pour lui un
émondage. Elle l’a conduit à simplifier, à aller à l’essentiel. Quand il a
retrouvé ses outils de sculpture et de calligraphie, cela a été comme une
résurrection, une explosion de son talent. Mais avec une pertinence et une
profondeur qu’il n’avait pas auparavant.
Il ne faut pas avoir peur des temps d’hiver de la vie
spirituelle, de la vie artistique. L’hiver n’est pas un temps mort, où tout se
fige. Mais c’est le temps où la sève des arbres descend dans les racines. Un
temps essentiel pour le jaillissement d’un printemps artistique. Quand nous
sommes dans des temps d’émondage, il ne faut jamais désespérer de la miséricorde
de Dieu, mais renouveller notre confiance qu’il est en train de forger notre
personnalité.
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