Après un parcours de musicien et compositeur dans l’Eglise réformée au
Canada et aux USA, le canadien Andrew Donaldson, est devenu le consultant pour
les célébrations du Conseil œcuménique des Eglises, à Genève. Entretien lors de
l’Assemblée mondiale du COE, où il a joué un grand rôle dans l’organisation des
divers cultes.
Andrew Donaldson. |
A. Donaldson, qu’est-ce qui vous a encouragé au début de votre carrière artistique ?
Alors que j’avais un intérêt
embryonnaire pour la guitare, un professeur m’a encouragé en m’écoutant et en
me prenant au sérieux. Il m’a fait écouter des morceaux du guitariste Julian
Bream. A l’âge de 14 ans, j’ai découvert qu’on peut exprimer la foi de manière
artistique, qu’il est aussi possible d’incorporer d’autres éléments dans une
liturgie, comme le cri, la colère, les questions, les doutes…
Ce professeur m’a fait aussi
découvrir Gilles Vigneaux et d’autres chansonniers. Cet adulte m’a pris au
sérieux. Un jour j’ai écrit une partition pour la fanfare de l’école et il m’a
dit : « Ah, ce n’est pas n’importe qui qui peut faire cela ». Cela
m’a touché : il avait vu pressenti que j’avais un certain talent.
Dans l’Eglise avez-vous rencontré des obstacles pour communiquer votre
art ?
J’ai découvert des lieux où on
explorait, où on cherchait à exprimer la vie et la foi de manière différente,
mais aussi des lieux où il n’y avait qu’une seule façon de le faire. Je crois
que j’ai de la chance, car s’il y a eu des obstacles, il y a aussi eu beaucoup
de situations où j’ai pu me développer.
Qu’est-ce qui continue à vous encourager ?
En acceptant ma position
actuelle comme consultant pour les célébrations (Worship consultant) au COE, on m’a dit que j’avais relevé le plus
grand défi de ma vie. Et c’est vrai, j’y rencontre des extraordinaires
différences culturelles et une grande diversité d’expressions confessionnelles.
Les attentes sont aussi très variées. Cela m’encourage car je dois continuer à grandir,
mais parfois le système et la bureaucratie me découragent.
C’est du grand art de collaborer avec tant de diversité !
Oui, il y a des sujets, où l’on
s’accorde et d’autres non. Il faut de la sagesse pour les discerner.
Qu’avez-vous découvert durant cette assemblée ?
Un chœur coréen durant l’Assemblée de Busan |
Je vous ai observé lorsque vous jouiez de la guitare. Vous me sembliez
très heureux !
Oui, mais aussi fatigué. La
musique, surtout avec d’autres personnes donne du bonheur. On m’a demandé quel
est mon instrument favori ; en fait ce n’est pas un instrument
particulier, mais c’est l’ensemble. Je suis vraiment heureux quand j’arrive à
créer un ensemble musical. C’est ce que j’aime.
Comment encourager de jeunes chrétiens à suivre un chemin dans les
arts ?
Je suis un enseignant et
j’essaye toujours de partager ce que j’ai appris. Il n’y a pas qu’une seule
façon de faire. Prendre la personne au sérieux, l’écouter, trouver ce qu’elle
aime faire et lui trouver une place dans la communauté cultuelle pour exprimer
ce talent. Il est important que la communauté soit assez souple pour accepter
un talent, même s’il paraît bizarre. Cela peut la transformer. Au lieu de
formater la personne pour la tâche, il faut inviter la communauté à accepter le
jeune artiste. Ainsi il trouvera un lieu pour exprimer ses talents.
Quelles sont vos sources d’inspiration quand vous composez des
chants ?
Je suis touché par presque
tout : une phrase bien tournée, un sermon, une fleur, un bon livre. La
communauté d’Iona en Ecosse m’inspire également beaucoup. J’ai entendu son responsable
dire que la vie en Dieu ne peut se mettre en bouteille, car Dieu vit dans le
présent. Cela fait deux ans que j’y réfléchis et j’ai l’impression qu’il a à la
fois raison et tort. Il est vrai qu’on ne peut vivre que le présent, mais l’art
nous rappelle aussi le moment qui s’évanouit. C’est par l’art que nous gardons
en mémoire les événements et que nous comprenons leur sens et leur envergure.
L’art permet d’approfondir la vie chrétienne, d’aller dans les profondeurs.
Quel est le sens artistique de la célébration chrétienne ?
Pour moi le culte est un art. Il
y a le début, le milieu et la fin. Dans ce cadre on joue, on explore les
émotions, on incarne des personnages qui ne nous sont pas identiques, mais nous
nous transformons en eux. C’est la même chose dans l’art. Le culte peut devenir
une vaine répétition, mais avec l’imagination on peut le transformer et être
transformé par lui. Ici à Busan, le défi est que nous n’avons pas de langue ni
de répertoire communs. Nous devons nous élargir en priant ensemble.
Avez-vous rassemblé déjà des jeunes musiciens de différentes
Eglises ?
J’ai organisé un atelier avec plusieurs jeunes à Séoul et je vais continuer ce travail avec le COE : rassembler des jeunes pour qu’ils partagent ce qu’ils créent. Si c’était possible, je ne ferais que cela : réunir les gens et créer ensemble. C’est quelque chose que le COE
a développé pendant des années et il m’encourage maintenant à le poursuivre.
J’ai été très touché par un atelier de création en 1990 où nous avons écrit
surtout des prières. Cet atelier a duré 10 jours et était axé sur la musique
des Caraïbes, mais finalement nous avons exploré toutes sortes de musiques. Ce
qui m’a surtout touché est que la musique était basée sur des chants populaires
et encourageait le chant d’Eglise. Une énergie, une richesse qui manquaient
dans les chants chrétiens que je connaissais à cette époque.
Une espérance ?
A. Donaldson durant une célébration à Busan |
J’espère que même si nous n’avons
chanté des chants qu’une seule fois durant cette assemblée, les participants
prendront ces chants avec eux et les partageront avec d’autres. Même si ce
n’est qu’un seul chant, car on peut les trouve sur internet.
Propos recueillis par Martin Hoegger
Liens internet :
Photos : David
Kopulos, Peter Williams, Martin Hoegger
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